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Histoire de la démocratie au Brésil

Une democratie clientèliste

Une démocratie clientèliste au Brésil

PRESENTATION

Dans «Cidadania no Brasil – o longo caminho” (“Citoyenneté au Brésil – le long chemin”), de 2001, José Murilo de Carvalho analyse l’histoire citoyenne et l’évolution de la démocratie du Brésil depuis son indépendance en 1822.

Son analyse est structurée à partir des travaux du sociologue britannique Thomas Humprey Marshall selon qui la citoyenneté suit une séquence de conquête de trois catégories de droits : les droits civils d’abord, au XVIII siècle, suivi des droits politiques au XIX ème siècle et enfin des droits sociaux au XXème siècle.

Cette séquence suit une logique de développement de la citoyenneté selon laquelle les individus commencent par prendre conscience de droits qui leurs sont propres  (droits civils), les conduisant à revendiquer ensuite une participation plus directe de l’action politique (droits politiques) pour défendre et exercer leurs droits civils (ex. liberté d’expression). Il n’y a pas de droits politiques sans droit civil.

Les droits sociaux, apparus au XXème siècle, consistent à mieux répartir la richesse nationale. Ces droits peuvent éventuellement exister alors même que les droits civils et politiques ne sont pas encore très forts dans la société, mais dans ce cas c’est l’arbitraire qui prévaudra dans la distribution des droits sociaux.

C’est ainsi que l’évolution citoyenne du Brésil a suivi un parcours sinueux et bancal, qui se poursuit encore, par lequel les droits sociaux ont prévalu sur les deux autres. De cette façon, si la démocratie au Brésil semble bien implantée, l’élection étant son socle plus que centenaire, elle est pratiquée plus pour la défense d’intérêts particuliers au travers du clientèlisme, que de l’intérêt collectif.

UNE « ETAYENNETE »

Au Brésil les progrès en matière sociale sont toujours venus des régimes autoritaires avec d’abord la dictature de Gétulio Vargas de 1937 à 1945, qui a adopté les premières lois sociales, principalement la Consolidation des Lois du Travail-CLT. Mais aussi la dictature militaire de 1964 à 1985, qui a notamment étendu la protection sociale en faveur des travailleurs ruraux.

L’impulsion donnée par les régimes autoritaires à la protection sociale a eu pour conséquence de valoriser le pouvoir exécutif au détriment du parlement. Le gouvernement, pouvoir exécutif, apparait aux yeux de la population comme le pouvoir important.

Selon José Murilo de Carvalho, cette fascination pour le pouvoir exécutif est probablement une des raisons qui ont conduit au choix d’un régime présidentiel plutôt que parlementaire lors du plébiscite de 1993. Il ajoute « L’action politique est surtout orientée par la négociation directe avec le gouvernement, sans passer par la médiation de la représentation.[….] Cette culture plus orientée vers l’Etat que la représentation est ce que nous appelons « étayenneté », en contraste avec la citoyenneté. »

REPRESENTATION PERSONNELLE VS REPRESENTATION NATIONALE

La démocratie des pays européens, ainsi comme au Brésil, se manifeste par le vote des citoyens pour le choix de leurs représentants au parlement. Ces représentants ont pour fonction de voter les lois et contrôler l’action du gouvernement. Ces représentants sont élus sur la base de modes de scrutin divers en fonction des pays (scrutin majoritaire; scrutin proportionnel), mais ils ne représentent pas leurs électeurs directs, ils représentent toujours la nation toute entière, car les lois sont votées pour tous et le gouvernement agit pour tous.

Or, au Brésil, dont les institutions reposent sur la séparation des Pouvoirs, sur le modèle des Etats Unis d’Amérique, les députés sont considérés représenter les électeurs de leurs circonscriptions. Ainsi, les lois fédérales ne sont pas votées sur une vision nationale, mais sur des préoccupations locales et corporativistes. L’élu ne regarde pas l’intérêt de la nation, mais essaye de répondre aux demandes particulières des électeurs de sa circonscription.

Ainsi écrit José Murilo de Carvalho : « La représentatiuon politique ne fonctionne pas pour régler les grands problèmes de la majeure partie de la population. Le rôle des législateurs se réduit, pour la plupart des votants, à celui d’intermédiaire de faveurs personnelles auprès de l’Exécutif. L’électeur vote pour le député en échange de promesses de faveurs personnelles ; le député soutient le gouvernement en échange de postes et fonds à distribuer parmi ses électeurs. Il se crèe ainsi une espèce de schizophrénie politique : les électeurs méprisent les politiques, mais continuent de voter pour eux en espérant tirer des avantages personnels. » (« Cidadania no Brasil » 2008, p. 223/224).

AMENDEMENTS PARLEMENTAIRES A LA LOI DE FINANCE

Une bonne illustration de ce clientélisme est la pratique des « emendas parlamentares » (« amendements parlementaires ») à la Loi de Finance Annuelle (LOA). Selon la tradition, lors de l’analyse de la loi de finance, les parlementaires, individuellement ou par groupes géographiques, font des amendements au projets de loi afin d’y inclure des dépenses spécifiques à des projets locaux de leurs bases électorales. Ces amendements sont négociés avec le gouvernement fédéral sur la base de faveurs personnelles.

Cette pratique s’est tellement institutionnalisée qu’elle a été insérée dans la Constitution Fédérale par l’amendement constitutionnel n.86 du 17.03.2015.

Bertrand de Solere
Avocat aux Barreaux de Rio de Janeiro et São Paulo
Conseiller du Commerce Extérieur de la France-CCEF

Le cabinet Solere est un cabinet d’avocats brésiliens. Il est à votre disposition pour vous accompagner et vous conseiller dans vos démarches au Brésil. Notre cabinet sera ravi de vous accompagner au 55-21-9-81-01-61-51, directement par message WhatsApp (cliquez sur ce lien pour ouvrir l’application) ou par e-mail.

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